La Tradition de l'Eglise a accordé, au 
                                  cours des siècles, à l'Eglise 
                                  de Constantinople - comme à toute autre 
                                  Eglise locale d'ailleurs, selon le cas chorogéographique 
                                  et temporel - certaines modalités canoniques 
                                  pour accomplir l'uvre sotériologique 
                                  qu'accomplit chaque Eglise locale dans l'espace 
                                  et dans le temps. Ces modalités peuvent 
                                  être réparties en différentes 
                                  catégories.
                                  
                                1.- 
                                  La juridiction de l'(Archi)épiscopalie 
                                  de Constantinople
                                  C'est la ville épiscopale de Constantinople 
                                  - y compris son hinterland (arrière-pays) 
                                  - dont l'(arch)évêque porte le 
                                  titre de (est le) patriarche du Patriarcat homonyme. 
                                  De même, la presqu'île hagiorite 
                                  du Mont Athos est considérée comme 
                                  territoire de l'(archi)épiscopie de Constantinople, 
                                  car le patriarche est l'évêque 
                                  de ce lieu, exerçant la plénitude 
                                  des droits épiscopaux.
                                  
                                2.- 
                                  La juridiction du " Patriarcat de Constantinople 
                                  "
                                  Les limites géo-ecclésiastiques 
                                  du Patriarcat de Constantinople - comme des 
                                  autres quatre Patriarcats (anciens) d'ailleurs 
                                  - reposent sur des fondements historico-canoniques. 
                                  L'événement décisif pour 
                                  les Eglises patriarcales a été 
                                  le 4è Concile cuménique 
                                  de Chalcédoine (451). Comme l'on sait, 
                                  l'uvre canonique de ce concile a consisté 
                                  à la constitution de nouvelles " 
                                  entités géo-ecclésiastiques 
                                  ", qualifiées par le terme "Patriarcat" 
                                  (voir note 1). 
                                  II s'agit d'une nouvelle existence canonique, 
                                  inconnue dans la tradition de l'Eglise jusqu'alors, 
                                  qui reflète la volonté de l'Eglise 
                                  - créant l'ensemble des Patriarcats - 
                                  de s'administrer synodalement dans toutes les 
                                  manifestations de sa vie " institutionnelle 
                                  ". L'Eglise a regroupé donc au cours 
                                  des 4e et 5e siècles les " métropoles 
                                  autocéphales " du vaste Empire romain 
                                  en Patriarcats pour mieux organiser et aider, 
                                  à travers l'institution du " synode 
                                  local ", l'Eglise locale.
                                  Une question se pose toujours à ce propos 
                                  : depuis quand le Patriarcat de Constantinople 
                                  existe-t-il en tant que tel ? La réponse 
                                  demeure claire : depuis que les autres Patriarcats 
                                  ont pris naissance en tant que tel par la volonté 
                                  conciliaire de l'Eglise, au 4è Concile 
                                  cuménique (451). Dans cette perspective 
                                  patriarcale, conciliairement établie, 
                                  le Patriarcat de Constantinople avait acquis 
                                  la deuxième place dans la taxis (des 
                                  diptyques) canonique des Eglises. Par ailleurs, 
                                  ce même 4è Concile cuménique 
                                  "désigna" d'une autre manière, 
                                  sans la mentionner expressis verbis, l'autocéphalie 
                                  de l'Eglise de Chypre qui avait été 
                                  déterminée par le 3è Concile 
                                  cuménique d'Éphèse 
                                  (431). Ledit Concile confirma une pratique ecclésiale 
                                  transmise par la tradition métropolitaine 
                                  de l'Eglise, alors que, par la suite, le 4è 
                                  Concile cuménique (451) reconfirma 
                                  " par son silence " la même 
                                  autocéphalie administrative de Chypre 
                                  en regroupant toutes les autres métropoles 
                                  et diocèses de l'Empire romain en Patriarcats 
                                  sans y intégrer l'Eglise autocéphale 
                                  de Chypre. C'est la formation des cinq entités 
                                  ecclésiales auxquelles la tradition canonique 
                                  de l'Eglise accorda la qualité patriarcale 
                                  caractérisée par ce qu'on appelle 
                                  aujourd'hui un droit ecclésial " 
                                  absolu ".
                                  Pour récapituler l'évolution canonique 
                                  de l'Eglise au cours des cinq premiers siècles, 
                                  on peut présenter les étapes successives, 
                                  bien distinctes, de son organisation :
                                  1. Episcopè / Eglise locale (Nouveau 
                                  Testament/3 premiers siècles)
                                  2. Métropole (1er Concile cuménique 
                                  de Nicée - 325)
                                  3. Eglise autocéphale (3e Concile cuménique 
                                  d'Éphèse - 431)
                                  4. Patriarcat (4e Concile cuménique 
                                  de Chalcédoine - 451)
                                  5. La Pentarchie des Patriarcats (4e Concile 
                                  cuménique - 451)
                                  Ce dernier élément, celui de la 
                                  pentarchie, constitue un système canonique 
                                  -et non pas une institution- fondé sur 
                                  le principe de l'indépendance administrative 
                                  ecclésiastique (autocéphalie) 
                                  réservant une juridiction propre dite 
                                  patriarcale (jus patriarchati), inventé(e) 
                                  canoniquement par l'Eglise (4è Concile 
                                  cuménique de Chalcédoine 
                                  - 451). La pentarchie synodale vient s'ajouter 
                                  au système métropolitain (1er 
                                  Concile cuménique de Nicée 
                                  - 325) et au système de l'autocéphalie 
                                  (3è Concile cuménique d'Éphèse 
                                  - 431). En effet, l' coumènè 
                                  chrétienne d'alors s'organisait ecclésialement 
                                  autour de cinq centres de gravité ou 
                                  de primat, coïncidant avec les centres 
                                  historiques majeurs de la chrétienté 
                                  : c'est-à-dire Rome, Constantinople, 
                                  Alexandrie, Antioche et Jérusalem. II 
                                  s'agit d'une répartition administrative 
                                  conciliaire de l'autorité -synodale- 
                                  de l'Eglise en cinq patriarcats désignant 
                                  / voulant exprimer la manifestation de la synodalité 
                                  dans son administration suprême et de 
                                  laquelle font également partie, par la 
                                  suite et à ce jour, les Eglises autocéphales. 
                                  Cette articulation structurale a des incidences 
                                  ecclésiologiques depuis sa constitution 
                                  conciliaire.
                                  C'est ainsi que le système de la Pentarchie 
                                  inventé par l'Eglise au 4e Concile cuménique 
                                  de Chalcédoine (451), selon la taxis 
                                  canonique adoptée alors, présente 
                                  la structure suivante : 1. Patriarcat de Rome, 
                                  2. Patriarcat de Constantinople, 3. Patriarcat 
                                  d'Alexandrie, 4. Patriarcat d'Antioche et 5. 
                                  Patriarcat de Jérusalem.
                                  Or l'Eglise de Constantinople se présente 
                                  alors comme possédant une " nouvelle 
                                  existence canonique " avec un territoire 
                                  canonique de sa circonscription patriarcale 
                                  qualifiée historiquement par la ville 
                                  de Constantinople et les trois éparchies 
                                  limitrophes (Thrace, Pont et Asie Mineure). 
                                  On devrait par la suite le définir choro-géographiquement 
                                  par les quatre mers (Noire, Méditerranée, 
                                  Adriatique et Baltique), comme le deuxième 
                                  trône patriarcal dans le " système 
                                  de la pentarchie " des Patriarcats, et 
                                  jouissant d'une primauté d'honneur -selon 
                                  la taxis - au sein de l'Eglise orthodoxe " 
                                  répandue à travers tout l'univers 
                                  " (voir 
                                  note 2) après la " désunion 
                                  ecclésiale " survenue en 1054.
                                  
                                3.- 
                                  L'exercice du " droit préjuridictionnel 
                                  " du Patriarcat
                                  Cette modalité est également liée 
                                  à la notion de patriarcat définie 
                                  parle 4è concile cuménique 
                                  (451). En effet, comme les autres patriarcats, 
                                  le Patriarcat cuménique (voir 
                                  note 3) de Constantinople englob(ait)e, 
                                  hier comme aujourd'hui, plusieurs nations-ethnies. 
                                  Cela est une caractéristique fondamentale 
                                  qui qualifie, entre autres, les patriarcats.
                                  La procédure conciliaire réalisée 
                                  au sein de la Tradition canonique de l'Eglise 
                                  pour les autres Eglises patriarcales d'alors, 
                                  fut également la même pour ce qui 
                                  concerne le Patriarcat cuménique 
                                  (voir 
                                  note 4). En effet, l'Eglise, par voie conciliaire 
                                  (voir 
                                  note 5), lui confia les diocèses 
                                  (voir 
                                  note 6) de la Thrace, du Pont et de l'Asie 
                                  Mineure, en lui accordant le "jus patriarchi", 
                                  le droit de juridiction d'un patriarche, comme 
                                  cela avait été le cas pour les 
                                  quatre autres patriarches, ceux de Rome, d'Alexandrie, 
                                  d'Antioche et de Jérusalem. II acquit 
                                  alors un " droit juridictionnel territorial 
                                  " dans les limites de son patriarcat. Le 
                                  territoire patriarcal juridictionnel - jusqu'à 
                                  la fin du 1er millénaire - est étendu 
                                  et déterminé historiquement et 
                                  choro-géographiquement par quatre mers 
                                  (Noire, Méditerranée, Adriatique 
                                  et Baltique). Or, sur le territoire européen, 
                                  il s'agit bien de la péninsule Balkanique 
                                  toute entière prolongée vers les 
                                  pays nordiques (Europe centrale et orientale). 
                                  L'attribution de ce territoire juridictionnel, 
                                  on l'a vu, date du 4è Concile cuménique 
                                  (451) et, par la suite, de l'attachement à 
                                  ce trône patriarcal de l'Illyricum orientale 
                                  (731). Par conséquent, depuis 451 / 731 
                                  jusqu'en 1593 (autocéphalie et patriarchie 
                                  de l'Eglise de Russie) et 1850 (autocéphalie 
                                  de l'Eglise de Grèce), le territoire 
                                  déterminé ci-dessus lui demeurait 
                                  juridictionnellement propre. A partir de ces 
                                  dernières dates, son " territoire 
                                  juridictionnel " entier commence à 
                                  être canoniquement " amputé 
                                  " par la proclamation des différentes 
                                  autocéphalies ecclésiales, car 
                                  le Patriarcat constantinopolitain, pour affronter 
                                  le nationalisme et l'étatisme accrus 
                                  - transmis et apparus depuis le début 
                                  de 19e siècle dans les Balkans -, qui 
                                  avaient commencé à contaminer 
                                  la communion des différentes ethnies-communautés 
                                  ecclésiales (voir 
                                  note 7), réactiva le " système 
                                  de l'autocéphalie " que l'Eglise 
                                  avait déjà connu dans sa tradition 
                                  conciliaire. L'acquis de ce "droit juridictionnel 
                                  territorial " dont nous venons de parler, 
                                  constitue la raison principale justifiant la 
                                  proclamation des autocéphalies ecclésiales. 
                                  Pour appliquer ce droit accordé conciliairement 
                                  par l'Eglise, le Patriarcat de Constantinople 
                                  demeure seul à proclamer des autocéphalies.
                                  La soustraction progressive des territoires 
                                  du Patriarcat, appartenant à des Eglises 
                                  autocéphales canoniquement proclamées 
                                  en tant que telles, changea la structure géo-ecclésiastique 
                                  de l'Europe centrale et orientale, mais cette 
                                  dernière rest(ait)e un " territoire 
                                  ex-juridictionnel " (d'un sens / contenu 
                                  non définitif) ou plutôt un " 
                                  territoire préjuridictionnel " (voir 
                                  note 8).Ce terme donc - qui est un néologisme 
                                  - qualifie le territoire d'une Eglise autocéphale 
                                  émancipée par une juridiction 
                                  ecclésiale, toujours patriarcale, où 
                                  l'Eglise patriarcale-mère n'exerce aucune 
                                  autorité ecclésiastique juridictionnelle, 
                                  spirituelle ou administrative, car cette Eglise 
                                  est autocéphale. Il faut rappeler ici 
                                  encore que parmi les cinq Patriarcats anciens, 
                                  le Patriarcat de Constantinople demeure le seul, 
                                  pour des raisons historiques et théologiques, 
                                  qui pour faire face à des circonstances 
                                  pluriformes extrêmement difficiles, procéda 
                                  au système de l'autocéphalie dans 
                                  son ressort territorial patriarcal propre pour 
                                  les peuples ethniques formant un État 
                                  national. Les autres quatre Patriarcats anciens 
                                  ; (à savoir, de Rome, d'Alexandrie, d'Antioche 
                                  et de Jérusalem) n'ont pas pratiqué 
                                  ce système ecclésial. Or une Eglise 
                                  autocéphale moderne constitue, toujours 
                                  et par définition, un " territoire 
                                  préjuridictionnel " du Patriarcat 
                                  de Constantinople, duquel elle est issue et 
                                  canoniquement émancipée. Mais 
                                  elle ne constitue pas un " territoire ex-juridictionnel 
                                  ".
                                  Cela s'explique par le fait qu'en cas d'abolition 
                                  d'une Eglise autocéphale locale (cf. 
                                  les autonomies ecclésiastiques de Serbie 
                                  et de Bulgarie au cours du 12e siècle, 
                                  ainsi que l'exemple récent de l'Eglise 
                                  autocéphale d'Albanie (1967-1991)), la 
                                  juridiction en revient à l'Eglise patriarcale 
                                  de Constantinople ayant le plein droit canonique, 
                                  ainsi que l'initiative canonique d'agir pour 
                                  restaurer l'autocéphalie abolie par les 
                                  différentes circonstances. De ce point 
                                  de vue, dans l'Eglise orthodoxe, le " territoire 
                                  préjuridictionnel " du Patriarcat 
                                  de Constantinople est constitué de l'ensemble 
                                  de tout ressort territorial canonique des Eglises 
                                  autocéphales, -à l'exception de 
                                  l'Eglise autocéphale de Chypre, dont 
                                  l'autocéphalie a été proclamée 
                                  par le 3è Concile cuménique 
                                  d'Éphèse (431), et des quatre 
                                  Patriarcats anciens bien entendu - circonscrites 
                                  dans les limites " géo-patriarcales 
                                  " définies par les (2è, 4è 
                                  et le Quinisexte) conciles cuméniques, 
                                  c'est-à-dire de l'Europe centrale et 
                                  orientale. En conséquence, ce droit ecclésial 
                                  ne manifeste pas une " primauté 
                                  juridictionnelle ", mais, au contraire, 
                                  il explique le lien qui (doit) existe(r) entre 
                                  l'Eglise patriarcale-mère et les Eglises 
                                  autocéphales issues de son sein.
                                  La juridiction ecclésiale du Patriarcat 
                                  cuménique n'est pas en réalité 
                                  universelle. En tant qu'entité (géo)ecclésiale 
                                  déterminée par un territoire donné 
                                  (caractéristique de l'indigénité 
                                  (" entopiotès " en grec) mais 
                                  aussi que Patriarcat, il est (si étrange 
                                  que cela puisse paraître) en voie de limitation. 
                                  Le fait d'activer le système de l'autocéphalie 
                                  - il était tout à fait libre de 
                                  ne pas le faire - signifie qu'il a procédé 
                                  à un acte canonique par libre choix ayant 
                                  comme but initial et unique la sauvegarde de 
                                  l'unité ecclésiale à l'intérieur 
                                  de son ressort territorial patriarcal au ... 
                                  " détriment " de son intégralité 
                                  territoriale. Cela en fait " coûta 
                                  " - extérieurement et, si l'on veut, 
                                  politiquement parlant -, du point de vue territorial, 
                                  la diminution de sa juridiction territoriale 
                                  traditionnelle, ce qui représente bien 
                                  entendu une certaine valeur mais seulement relative, 
                                  en vue de rester en communion ecclésiale 
                                  permanente avec les peuples ethniques se trouvant 
                                  dans son espace juridictionnel patriarcal, émancipés 
                                  par les autocéphalies ecclésiales.
                                  Or, les (neuf) Eglises autocéphales existantes 
                                  à ce jour - à la seule exception 
                                  de l'Eglise autocéphale de Chypre qui 
                                  ne fit jamais partie du territoire juridictionnel 
                                  d'un des cinq Patriarcats -, à savoir, 
                                  les Eglises de Russie, de Serbie, de Roumanie, 
                                  de Bulgarie, de Géorgie, de Grèce, 
                                  de Pologne, d'Albanie et de Tchéquie 
                                  et Slovaquie, constituent un " territoire 
                                  préjuridictionnel " du Patriarcat 
                                  cuménique. La fondation des Eglises 
                                  sus-mentionnées explique manifestement 
                                  la constitution conciliaire du " Patriarcat 
                                  " par l'Eglise, qui, comme on l'a dit, 
                                  est (son territoire) en voie de limitation. 
                                  L'Eglise locale orthodoxe d'un Etat, ayant acquis 
                                  son autocéphalie ecclésiale, exerce 
                                  dans les limites étatiques une juridiction 
                                  positive strictement réservée 
                                  aux limites de cette Eglise autocéphale 
                                  (juridiction intraorius). Le territoire de cette 
                                  Eglise autocéphale étant soustrait 
                                  de ce (territoire) du Patriarcat, il n'est plus 
                                  juridiction de ce dernier, car cette Eglise 
                                  émancipée est " autocéphale 
                                  ". En revanche, après toutes ces 
                                  proclamations de l'autocéphalie précitées, 
                                  le Patriarcat cuménique de Constantinople 
                                  exerce une juridiction soustractive réelle 
                                  - sans que cela veuille dire qu'il perde sa 
                                  notion positive - sur le territoire patriarcal 
                                  qui reste après les proclamations canoniques. 
                                  En d'autres termes, cette juridiction soustractive 
                                  patriarcale concerne les territoires qui restent 
                                  en dehors des limites des Eglises autocéphales, 
                                  territoires qui n'appartiennent pas à 
                                  une autre Eglise autocéphale.
                                  Pour éclaircir encore la question posée, 
                                  ajoutons que le droit des cinq patriarches accordé 
                                  par le 4è Concile cuménique 
                                  de Chalcédoine (451), porte entre autres 
                                  une double notion : c'est (a) un droit territorial 
                                  et (b) un droit juridictionnel Le premier est 
                                  lié à la répartition territoriale 
                                  entre les cinq Patriarcats faite par le Concile 
                                  lui-même. Le second regarde l'espace intrajuridictionnel 
                                  de chaque trône patriarcal. Le privilège 
                                  patriarcal originel et l'initiative canonique 
                                  du Patriarcat cuménique - fondée 
                                  sur le droit juridictionnel territorial comme 
                                  droit d'émancipation - de proclamer des 
                                  Eglises autocéphales dans son " 
                                  territoire juridictionnel " fait exclusivement 
                                  partie de sa seconde qualité en tant 
                                  que Patriarcat. A celle-ci est également 
                                  liée la notion de " territoire préjuridictionnel 
                                  ", développée plus haut.
                                  Or, toutes les Eglises autocéphales possèdent 
                                  la première qualité en ayant leur 
                                  ressort territorial propre, dans lequel elles 
                                  peuvent agir canoniquement selon les principes 
                                  découlant de leur autocéphalie 
                                  (droit plein), sans pour autant qu'elles aient 
                                  le droit - et cela ressort des mêmes principes 
                                  - de sortir des limites de ce territoire canonique 
                                  pour exercer une juridiction hyperorius La seconde 
                                  qualité est donc strictement réservée 
                                  aux cinq anciens Patriarcats (droit absolu) 
                                  (voir note 9). 
                                  C'est pour cette raison également que 
                                  les Eglises autocéphales en tant que 
                                  Patriarcats (modernes) peuvent accorder une 
                                  autonomie (droit relatif) ecclésiale 
                                  intraorius- et non hyperorius-, mais non plus 
                                  une autocéphalie tant dans leur territoire 
                                  intrajuridictionnel que, encore moins, dans 
                                  un autre territoire hyperorius. On doit souligner 
                                  de même que le Patriarcat cuménique 
                                  a historiquement respecté, dans tous 
                                  les cas, l'autocéphalie patriarcale et 
                                  l'intégrité du territoire juridictionnel 
                                  des autres trônes patriarcaux proclamant 
                                  des Eglises autocéphales uniquement dans 
                                  les limites de son territoire patriarcal canonique 
                                  : ce sont celles (Eglises autocéphales) 
                                  qui se trouvent dans son " territoire préjuridictionnel 
                                  ". Il a donné l'exemple et ainsi 
                                  formulé la règle d'or d'un comportement 
                                  canonique bien entendu "non hyperorius".
                                  Nous proposons donc cette nouvelle approche 
                                  du "territoire préjuridictionnel" 
                                  sur la question posée, qui a manifestement 
                                  un fondement canonique, étant donné 
                                  que les autocéphalies ecclésiales 
                                  récentes n'ont pas encore été 
                                  revêtues d'une affirmation canonique conciliaire. 
                                  En utilisant ce terme nous n'entendons cependant 
                                  aucune notion de perspective d'assimilation 
                                  des Eglises autocéphales de la part du 
                                  Patriarcat cuménique. Le terme 
                                  canonique "Eglise-Mère" (Mater 
                                  Ecclésia) par ailleurs est bien justifié 
                                  par le terme " préjurdictionnel 
                                  " et ce dernier est en fait expliqué 
                                  par lui. C'est pour cette raison que le Patriarcat 
                                  cuménique s'est avéré 
                                  être un récepteur sensible des 
                                  problèmes des Eglises autocéphales 
                                  orthodoxes et, qu'en sa qualité d'Eglise-Mère, 
                                  il a soutenu leur lutte, comme il en avait le 
                                  devoir ecclésial de diverses manières.
                                  
                                4.- 
                                  La primauté d'honneur du Patriarcat
                                  Le Patriarcat cuménique de Constantinople 
                                  jouit, par ailleurs, après la désunion 
                                  et à la place de Rome, d'une " diaconie 
                                  préventive " acquise et reconnue 
                                  diachroniquement par les autres Eglises orthodoxes, 
                                  tant patriarcales qu'autocéphales en 
                                  raison de la taxis canonique en tant que " 
                                  primus inter pares " dans l'Eglise orthodoxe. 
                                  Cette primauté qui est une " primauté 
                                  de diaconie " (voir 
                                  note 10) et pas une primauté de pouvoir, 
                                  lui accorde la présidence - selon la 
                                  taxis de l'Eglise orthodoxe - parmi les primats 
                                  des Eglises patriarcales ou autocéphales 
                                  afin qu'une " égalité d'honneur 
                                  de bonne taxis " règne parmi eux 
                                  (voir note 
                                  11). Elle se traduit par un rôle de 
                                  droit d'appel, de coordination et de responsabilité 
                                  particulière en ce qui concerne la communion 
                                  (koinonia) entre les Eglises.
                                  Récapitulant la pratique de l'institution 
                                  de l'Eglise locale des trois premiers siècles 
                                  de l'ère chrétienne, de même 
                                  que celle du système métropolitain 
                                  (1er Concile cuménique - 325) et 
                                  du système de l'autocéphalie (3è 
                                  Concile cuménique - 431), le 4è 
                                  Concile cuménique de Chalcédoine 
                                  (451) s'orienta consciemment vers la formation 
                                  des entités géo-ecclésiastiques 
                                  nouvelles, inexistantes jusqu'alors comme telles 
                                  : les Patriarcats (il a fallu quatre siècles 
                                  pour que l'Eglise puisse arriver à une 
                                  étape d'organisation globale). Ce fait 
                                  historique au sein de l'Eglise marque aussi 
                                  bien une taxis dans la " koinonia " 
                                  entre Eglises, qu'une volonté constante 
                                  de manifestation de la synodalité dans 
                                  l'administration de l'ensemble de l'Eglise. 
                                  Cinq Eglises patriarcales et une Eglise autocéphale 
                                  (de Chypre) assuraient donc la perspective visée 
                                  par les fermentations canoniques de cette époque. 
                                   
                                Le 
                                  Patriarcat cuménique aujourd'hui 
                                  :
                                TURQUIE
                                  1.- Archiépiscopie de Constantinople
                                  2.- Métropole de Chalcédoine
                                  3.- Métropole d'Imbros et Ténédos
                                  4.- Métropole des Îles des Princes
                                  5.- Métropole de Dercos
                                GRECE
                                  1.- Eglise semi-autonome de Crète (8 
                                  Métropoles) 
                                  2.- Métropoles du Dodécanèse 
                                  (4) 
                                  3.- Métropoles des Nouveaux Territoires 
                                  (38) (Administrées provisoirement par 
                                  l'Eglise de Grèce ; Acte patriarcal et
                                  Synodal de 1928)
                                  4.- Politeia monastique du Mont Athos
                                EUROPE 
                                  CENTRALE ET OCCIDENTALE
                                  1.- Eglise autonome de Finlande (3)
                                  2.- Eglise autonome d'Estonie (1)
                                  3.- Eparchies de l'Europe centrale et occidentale 
                                  (8)
                                AMERIQUE
                                  1.- Archiépiscopie d'Amérique 
                                  et huit épiscopies (USA) (9)
                                  2.- Métropoles d'Amérique du Nord 
                                  et du Sud (sauf USA) (3)
                                ASIE
                                  1.- Métropole de Hong-Kong (1)
                                OCEANIE
                                  1.- Archiépiscopie d'Australie (1) 
                                  2.- Métropole de Nouvelle Zélande 
                                  (1)
                                      
                                par 
                                  le 
                                  très rév. archimandrite Grigorios 
                                  Papathomas, professeur à l'Institut de 
                                  théologie orthodoxe Saint Serge
                                      in 
                                        "Témoignage et Pensée 
                                        Orthodoxes" N°11-12 4è 
                                        trimestre 1999
                                      
                                 
 
                                
                                
                                 
                                
                                
                                
                                 
                                       
                                       
                                       
                                       
                                       
                                       
                                      NOTES
                                        
                                      
                                1.- 
                                  Après la formation de l'Eglise locale 
                                  à l'époque de l'Eglise primitive, 
                                  on observe que l'exercice de la fonction synodale 
                                  - qui exprime la nature profonde de la conciliarité 
                                  ecclésiale - s'est coulée tout 
                                  naturellement dans le cadre des provinces de 
                                  l'Empire romain. On constate dans le regroupement 
                                  des Eglises locales en 'Métropoles administratives 
                                  autocéphales", une pratique largement 
                                  manifestée dans l'uvre canonique 
                                  du 1er Concile cuménique de Nicée 
                                  (325). Le regroupement des Métropoles 
                                  en répartitions administratives plus 
                                  vastes donna par la suite les [cinq] Patriarcats 
                                  (4è Concile cuménique de 
                                  Chalcédoine - 451) : cf. VI. PHIDAS, 
                                  'L: 'autocéphalie" et l' "autonomie" 
                                  dans l'Eglise orthodoxe", in Néa 
                                  Sion, t. 71 (1979). p. 9-19 (en grec). 
                                      
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                                2.- 
                                  Voir le canon 57 du Concile local de Carthage 
                                  (419) ; cf. canon 56 du Quinisexte Concile cuménique 
                                  in Trullo (691). Une Eglise qui s'étend 
                                  " d'un bout à l'autre de l'univers 
                                  " (expression dans l'offrande de la sainte 
                                  Eucharistie ; divine liturgie de St Basile le 
                                  Grand de Césarée). 
                                      
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                                3.- 
                                  Le patriarche de Constantinople prit, pour la 
                                  première fois, le titre (la qualification) 
                                  ecclésiastique de " patriarche cuménique 
                                  " à l'époque de l'empereur 
                                  romain Justinien (527-565), qui donna ce titre 
                                  au patriarche Épihanios (520-535) en 
                                  533. (Selon une autre opinion, le patriarche 
                                  Jean IV le Jeûneur (582-595) fut proclamé 
                                  " patriarche cuménique "). 
                                  Depuis 533 (ou 588), le patriarche de Constantinople 
                                  porte le titre : " Archevêque de 
                                  Constantinople, Nouvelle Rome et Patriarche 
                                  cuménique ". Cf. Corpus Juris 
                                  Civilis : t. III, Novellae, Berlin 1954, v, 
                                  p 28. Voir également l'article intéressant 
                                  de A. Tuilier, "Le titre de Patriarche 
                                  cuménique et le schisme entre les 
                                  Eglises", in Messager de l'Exarchat du 
                                  Patriarche russe en Europe occidentale, n° 
                                  60 (1967), p. 215-229 ; de même, S. VAILHÉ, 
                                  "Le titre de Patriarche cuménique 
                                  avant Saint Grégoire le Grand", 
                                  in Echos d'Orient, t. XI (1908). p. 65-69 et 
                                  161-171 ; A. Tuilier, "Grégoire 
                                  le Grand et le titre de Patriarche cuménique", 
                                  ln Colloques internationaux du CNRS : Grégoire 
                                  le Grand, Paris, éd. du CNRS, 1986, p. 
                                  69-82 ; V. GRUMEL, "Le titre de Patriarche 
                                  cuménique sur les sceaux byzantins", 
                                  in Revue des Études Grecques, t. 58 (1945), 
                                  p. 212-218 ; A. TUILIER, "Le titre de Patriarche 
                                  cuménique à l'époque 
                                  de Michel Cérulaire et le schisme entre 
                                  les Eglises". ln Studia Patristica XI, 
                                  Berlin, Akademie-Verlag, 1972, p. 247-258 ; 
                                  V. LAURENT, "Le titre du Patriarche cuménique 
                                  et la signature patriarcale (Recherches de Diplomatique 
                                  et de Sigillographie byzantines)", in Revue 
                                  des Études Byzantines. t. VI (1948). 
                                  p. 526 ; Avr. SPATHARIS, Le Patriarcat cuménique, 
                                  institution panorthodoxe séculaire, Athènes, 
                                  "Centre des Hellènes de Constantinople". 
                                  1958, p. 13-15 (en grec). En ce qui concerne 
                                  le sens du terme cuménique dans 
                                  un contexte conciliaire. voir A. Tuilier, "Le 
                                  sens de l'adjectif cuménique dans 
                                  la tradition patristique et dans la tradition 
                                  byzantine", in Nouvelle Revue Théologique, 
                                  t. 86, n° 3 (1964). p. 260-271, et in Studia 
                                  Patristica VII, Berlin, Akademie-Verlag, 1966, 
                                  p. 413-424 ; J. E. ANASTASIOU, "L'usage 
                                  du terme cuménique par les Conciles", 
                                  in Grégoire Palamas, t. 49 (1966), p. 
                                  21-36 (en grec). 
                                      
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                                4.- 
                                  Cf. Damaskinos A. PAPANDREOU, "Le Patriarcat 
                                  cuménique dans les temps modernes", 
                                  ln Constantinople, le Patriarcat cuménique 
                                  et les monuments byzantins, Athènes- 
                                  Chambésy, Centre orthodoxe du Patriarcat 
                                  cuménique - E. Tzaphéris 
                                  (éd. française), 1989, p. 293-339.
                                      
                                Retour 
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                                5.- 
                                  Le Patriarcat cuménique est cité 
                                  comme trône alors métropolitain 
                                  important dés le 2è Concile cuménique 
                                  de Constantinople, en 381 ap. J.-C., et, relativement 
                                  aux "droits d'honneur", il se trouve 
                                  immédiatement après le Patriarcat 
                                  de Rome. Selon le 3e canon du Concile précité, 
                                  la place de l'évêque de Constantinople, 
                                  quant aux droits d'honneur, est " après 
                                  l'évêque de Rome, car elle [Constantinople] 
                                  est la " nouvelle " Rome ". Ce 
                                  canon fut réaffirmé par le 28è 
                                  canon de 4è Concile cuménique 
                                  de Chalcédoine (451 ap. J.-C.) et répété 
                                  dans le 36è canon du Quinisexte Concile 
                                  cuménique in Trullo (691 ap. J.-C.). 
                                  Ainsi, le Patriarcat cuménique 
                                  acquit la première place parmi les Patriarcats 
                                  de la "partie orientale de l'Empire romain", 
                                  ce qui avait été alors reconnu 
                                  également par l'autorité politique 
                                  impériale : " L'Eglise de Constantinople 
                                  est la tête de toutes les autres " 
                                  (Codex Justinianus, t, 2. 24, et Novelle n° 
                                  123). Le texte impérial veut accentuer 
                                  une priorité de l'Eglise locale de la 
                                  capitale, mais il respecte la taxis canonique 
                                  préexistante vis-à-vis de l'Eglise 
                                  de Rome qui avait acquis une priorité 
                                  pour des raisons analogues. 
                                      
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                                6.- 
                                  " Dioclétien, à la fin du 
                                  3è siècle, avait partagé 
                                  tout l'Empire romain (Occident et Orient) en 
                                  douze diocèses civils groupés 
                                  en quatre grandes préfectures. Trois 
                                  de celles-ci (Italie, Gaule. et Illyrie) constituèrent 
                                  le Patriarcat de Rome. La quatrième préfecture 
                                  dite préfecture d'Orient avait cinq diocèses 
                                  civils : la Thrace, l'Asie, le Pont, le diocèse 
                                  d'Orient [Antioche] et l'Egypte [Alexandrie]. 
                                  Les trois autres diocèses civils de Thrace. 
                                  Asie, et le Pont, [...] donnèrent naissance 
                                  au Patriarcat de Constantinople " ; P. 
                                  LESOURD et J.-M. RAMIZ, Le pape et le patriarche. 
                                  Paris 1964, p. 9-10. 
                                      
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                                7.- 
                                  Durant la période de l'ottomanocratie, 
                                  parmi les asservis qui constituaient une "mosaïque 
                                  des nationalités", le lien de base 
                                  était l'Orthodoxie ecclésiale 
                                  au sein du Patriarcat de Constantinople.
                                      
                                 
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                                8.- 
                                  Il s'agit d'une approche développée 
                                  dans notre étude " Le Patriarcat 
                                  cuménique de Constantinople, les 
                                  Eglises autocéphales orthodoxes de Chypre 
                                  et de Grèce, et la Politeia monastique 
                                  du Mont Athos dans l'Europe unie Approche nomocanonique 
                                  ", (Thèse de Doctorat en droit canonique, 
                                  présentée à la Faculté 
                                  de Droit de l'Université Paris Xl et 
                                  à la Faculté de Droit canonique 
                                  de l'Institut Catholique de Paris), vol. 1, 
                                  Paris 1994, p. 124-130, et reprise ici d'une 
                                  manière adaptée au sujet du présent 
                                  article.
                                      
                                 
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                                9.- 
                                  Voir la qualification interprétative 
                                  et distinctive de chaque entité géo-ecclésiale 
                                  qu'elle soit un Patriarcat ([ancien] qui porte 
                                  un droit absolu), une Eglise autocéphale 
                                  (qui porte un plein droit) et une Eglise autonome 
                                  (qui porte un droit relatif), faite correctement 
                                  par le canoniste Pr. AKANTHOPOULOS, Les institutions 
                                  de l' "autonomie" et de I' "autocéphalie" 
                                  des Eglises orthodoxes selon le droit positif 
                                  du Patriarcat cuménique au XIXè 
                                  et XXè siècles, Thessalonique 
                                  1988, p. 32 (en grec). 
                                      
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                                10.- 
                                  Cf. BARTHOLOMEOS de Philadelphie (actuel patriarche 
                                  cuménique), "Le Patriarcat 
                                  cuménique et sa fonction au sein 
                                  du monde chrétien" (interview) in 
                                  Episkepsis, n° 334 (15-4- 1985), p. 11. 
                                  
                                      
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                                      11.- 
                                        Cf. Pidalion, Athènes 1993, p. 
                                        157-158 (en grec). 
                                      
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